Vendredi 15 avril, Joseph Kabila avait des raisons de boire du petit lait. La Tshangu connue pour être le baromètre politique de la capitale a de manière spontanée offert un bain de foule à l’ancien Président de la république.
Il n’en fallait pas plus pour que les partisans de l’autorité morale du FCC se mettent à rêver debout et les yeux grands ouverts de la résurrection-reconquête de leur mentor. Normal. Légitime, au demeurant. A leur place et dans les mêmes circonstances, des sympathisants d’autres formations politiques n’auraient pas fait la fine bouche, encore moins boudé leur plaisir.
Pour autant, une fois la séquence onirique évacuée, s’invite la lucidité. Laquelle commande que l’on ne sur-interprète ni sous-interprète cette « Raismania« .
Ne pas sur-interpréter ce bain de foule parce qu’il est le propre des peuples d’adorer aujourd’hui ce qu’ils ont brûlé hier. Et vice versa. Là réside la notion de versatilité et d’évanescence de l’opinion. En l’espèce, le régime Tshisekedi-fils peinant à répondre aux urgences, aux priorités et plus globalement aux attentes, toutes himalayennes, du plus grand nombre ; il est bien évident que le capital-sympathie au sein de l’opinion s’érode. Le désenchantement est d’autant plus grand que le « gouverner autrement« , vieux credo de l’UDPS, n’est -jusqu’ici- pas perceptible.
Pire, les Congolais qui espéraient avoir fini de manger leur pain noir n’ont plus de pain du tout. Les voilà qui tombent de charybde en scylla. De là à rétropédaler, il n’y a qu’un pas pour nostalgiquement retrouver JKK. En faisant-bénévolement – un triomphe au Président honoraire, les Kinois comme les Boyomais il y a quelques semaines expriment leur mécontentement vis-à-vis de son successeur.
Symétriquement, le Président Fatshi commettrait une grande erreur en minimisant la « Friday success » de son prédécesseur. Cette escorte populaire dans la partie de la capitale la plus représentative de « vraies gens » est comme ce thermomètre qui indique le niveau de la fièvre. Dans son repos éternel sous la terre de la Tshangu, le très populaire Etienne Tshisekedi, du haut de ses mille et un bains de foule, sait que quand ce district dit rouge de Kinshasa commence à éternuer, le Pouvoir s’enrhume automatiquement.
La Fatshisphère serait donc bien inspirée de prendre l’exacte mesure du message de la Tshangu. Les ovations faites à Joseph Kabila traduisent le ras-le-bol de ceux-là même qui rêvaient du « grand soir » ou -pour faire année CNS- du « changement radical » avec l’UDPS à la tête du pays.
Ironie du sort, au lieu que l’UDPS change le pouvoir c’est celui-ci qui change radicalement les tenants UDPS du pouvoir. Le désappointement est tel que même les intraitables « parlementaires debout » se mettent à dénoncer la « gouvernance poussive sur fond de culture de jouissance« . Un coup de semonce sans frais.
José NAWEJ