Verdict symbolique, rendu par le jury du tribunal international et local sur le Congo. C’était à l’issue des audiences de Kolwezi, chef-lieu du Lualaba, le dimanche 12 décembre. Le géant minier Glencore a été fortement reconnu impliqué dans les graves accidents et pollution de l’environnement. Les victimes eux, espèrent réparation.
« Il y a une forte implication de responsabilité des élites politiques, des entreprises multinationales et de la communauté internationale », a indiqué Me Sylvestre Bisimwa, président du tribunal sur le Congo, dans une série d’accidents, de cas de corruption et de pollution environnementale dans la région minière de Kolwezi.
Comme pour le premier tribunal sur le Congo à Bukavu et à Berlin en 2015, Sylvestre Bisimwa, indique que, « ce jugement est symbolique, mais contient des éléments importants pour les victimes, la société civile, la République démocratique du Congo et la communauté internationale. Dans la mesure où il sanctionne les violations commises par Glencore, à travers les quatre cas examinés lors de ses audiences de Kolwezi », a souligné l’avocat .
« Le verdict est symbolique, parce qu’il porte sur un échantillon des victimes précises, comme nous l’avons eu à le constater lors des interviews et témoignages des victimes. Car les activités des entreprises multinationales au niveau de la RDC, causent des effets néfastes qui sont dramatiques. Nous estimons que ce jugement montre non seulement une petite partie de l’iceberg. Mais nous devons donc nous en approprier pour faire le plaidoyer (en particulier la société civile du Lualaba), pour dénoncer ce qui ne marche pas. Nous devons aussi nous approprier cette décision, pour dénoncer les crimes odieux, inadmissibles, contre l’humanité commis par les multinationales », a-t-il insisté.
Les entreprises multinationales profitent de la faiblesse de l’Etat
Durant les audiences, le jury a examiné quatre cas, sur lequel il a répondu à 7 questions, à savoir:
Les entreprises internationales ont-elles profité de la situation politique de l’après-guerre et de la faiblesse de l’Etat pour s’accaparer des concessions minières ?
Le Tribunal sur le Congo estime qu’elles ont profité des conditions particulières d’un pays post-conflit et d’un gouvernement particulièrement faible, issu d’un compromis politique et non d’élections démocratiques pour établir un régime fiscal avantageux. En outre, elles ont bénéficié de la libéralisation des actifs miniers.
S’agissant des taxes et impôts qu’elles doivent à l’Etat congolais, le même tribunal reconnaît qu’elles payent ses droits et taxes, sauf une forte évasion fiscale et financière.
« Elles paient des impôts qui représentent 30% des recettes de l’Etat. Cependant les entreprises étrangères mettent en œuvre des mécanismes d’optimisation fiscale, favorisés par le fait que le siège social de la plupart d’entreprises minières se trouve à l’extérieur de la RDC, ce qui permet à ces dernières de ne pas se sentir liées par le droit congolais. Il y a évasion fiscale et financière ».
L’Etat congolais prend-il ses responsabilités pour exiger à ces entreprises de s’acquitter des impôts et taxes et de respecter leurs obligations sociales et légales ?
Oui, l’Etat congolais se comporte en rentier, il perçoit les impôts et les taxes, et s’il le faut, il multiplie les redressements fiscaux. Mais il y a eu insuffisance de suivi surtout entre 2002 et 2018. Par la suite, en 2018 les lois ont changé. En ce qui concerne les obligations sociétales des entreprises, il y a une totale insuffisance de suivi. En outre, l’Etat congolais n’exige pas assez fermement le paiement des impôts de base.
Les victimes des accidents
Le jury a constaté que les victimes d’accidents et de pollution créés par l’industrie minière n’ont jamais été indemnisées de manière adéquate et juste.
Les entreprises n’assument pas leur responsabilité sociale et l’Etat est trop faible pour assurer cette protection à ses citoyens. Etat faible, ne prend pas ses responsabilités lorsqu’il s’agit de défendre ses citoyens.
Les activités minières et les investissements des multinationales contribuent-elles au développement socio-économique des régions minières en permettant la construction d’infrastructures adéquates, en créant des emplois et en favorisant des branches voisines de l’économie locale ?
Le budget de l’Etat oscille entre 5 et 6 milliards de dollars et l’industrie minière y contribue pour quelque 40 à 50%. Les entreprises minières ont créé quelque 30.000 emplois directs et entraîné la construction de nouvelles infrastructures comme des barrages et des routes qui étaient nécessaires à leurs activités.
Cependant, par rapport aux besoins des économies locales, ces infrastructures étaient insuffisantes et inadéquates. Dans le futur cette situation pourrait changer si les lois découlant de la décentralisation étaient appliquées correctement.
Les activités minières créent-elles des effets néfastes et des conflits qui mettent en danger le développement économique et le bien être des générations futures ?
Le Tribunal croît que l’avenir du Congo est hypothéqué car les lois qui existent actuellement sont insuffisantes et mal appliquées. L’Etat congolais devrait prendre ses responsabilités et adopter de nouvelles dispositions juridiques.
Adrien AMBANENGO