C’est désormais confirmé. Ce vendredi 27 juin, tous les regards seront tournés vers la capitale américaine. Le président américain Donald Trump, en marge du sommet de l’OTAN à La Haye, a annoncé la signature d’un accord de paix historique entre la République démocratique du Congo et le Rwanda.
Une déclaration brève mais lourde de sens. Trump se vante. « Le Congo et le Rwanda seront à Washington ce vendredi. Nous allons tenter de mettre fin à cette guerre. Cela fait trop longtemps que ça dure », a-t-il déclaré.
Derrière cette phrase se cache une manœuvre diplomatique d’une rare intensité, pilotée depuis plusieurs mois par Washington et Doha, avec la participation directe d’équipes techniques congolaises et rwandaises. L’objectif est d’éteindre un conflit endémique qui ravage l’Est de la RDC depuis plus de deux décennies, sur fond d’agressions transfrontalières, de soutien aux groupes armés et de pillage systématique des ressources naturelles.
L’accord final, dont les grandes lignes ont été révélées par les équipes négociatrices le 18 juin, comprend cinq piliers majeurs : le respect de l’intégrité territoriale et l’interdiction formelle des hostilités, le désengagement et désarmement progressif des groupes armés non étatiques, la création d’un mécanisme conjoint de coordination sécuritaire, basé sur le plan CONOPS du 31 octobre 2024, le retour encadré des déplacés et réfugiés, accompagné d’un accès humanitaire garanti, l’ébauche d’un cadre régional d’intégration économique impliquant également l’Angola et la Zambie, via le corridor de Lobito.
Pour Washington, cette signature est un coup diplomatique stratégique, renforçant son influence dans la région des Grands Lacs face à la Chine, de plus en plus présente dans les projets miniers, et à la Russie, qui tente d’implanter discrètement ses réseaux sécuritaires. Pour le Qatar, partenaire discret mais actif, il s’agit d’asseoir son rôle de médiateur incontournable dans les conflits africains, après ses succès relatifs au Tchad et au Soudan.
Côté congolais, Félix Tshisekedi joue gros. À moins de deux ans de la fin de son second mandat, il cherche à inscrire son nom dans l’histoire comme l’artisan de la paix dans l’Est. Mais à quel prix ? L’opposition gronde déjà, accusant le pouvoir de céder du terrain au Rwanda sans justice ni vérité pour les victimes.
L’épineuse question du M23, bras armé officieux de Kigali selon Kinshasa, reste au cœur des crispations. Les autorités de l’AFC M23 réfutent, elles, tout probable départ de Goma et Bukavu après la signature de cet accord. L’ancien président Joseph Kabila, qui s’aligne à cotés de revendications du M23 ne jure que par un dialogue entre congolais encadré par l’église catholique et l’ECC. Cette opinion divise encore. Martin Fayulu qui a rencontré récemment le président Félix Tshisekedi, consulte aussi de sa part démontrant une opposition divisée. Ça reste quand même une question interne.
À Kigali, l’enjeu est double : faire lever les sanctions informelles qui pèsent sur son régime et reprendre langue avec ses partenaires internationaux, sans apparaître comme celui qui capitule.
En toile de fond, une question fondamentale : les États africains peuvent-ils encore régler leurs différends en dehors des forums armés ? La réponse viendra de l’application concrète de cet accord, qui devra rapidement passer de l’intention diplomatique à la mise en œuvre sur le terrain. Le risque d’un accord de façade, vidé de sa substance par les jeux d’intérêts locaux ou la mauvaise foi des signataires, n’est pas à exclure. On dit : qui veut la paix prépare la guerre ! Mais si ce texte tient ses promesses, il pourrait devenir un précédent structurant pour la résolution des conflits en Afrique centrale. Le rendez-vous de Washington ne sera donc pas qu’un sommet de plus.

