La capitale congolaise s’est éveillée ce lundi dans une atmosphère lourde, presque suspendue. Les grandes artères étaient inhabituellement fluides, les taxi-bus circulaient à vide ou peinaient à se remplir, tandis que les commerces ouvraient timidement leurs portes.
Au cœur de cette matinée étrange, une manifestation annoncée mais jamais vue. Jean-Marc Kabund, président de l’Alliance pour le changement (A.Ch), avait appelé à une marche pacifique pour exiger la tenue d’un dialogue politique national. Une initiative rapidement étouffée par les autorités urbaines.
La veille, le gouverneur de la ville-province de Kinshasa, Daniel Bumba, avait formellement interdit la marche, évoquant des impératifs d’ordre public. Des instructions claires avaient été données aux forces de l’ordre : empêcher tout rassemblement et disperser tout attroupement susceptible de troubler la quiétude de la ville.
Des policiers déployés aux carrefours, des patrouilles mobiles, et une surveillance accrue autour de certains points sensibles. Au domicile de Jean-Marc Kabund, les forces de l’ordre ont maintenu un cordon sécuritaire, retenant l’opposant chez lui et empêchant toute sortie.
« Il n’y a pas eu de marche, mais la tension était bien là », confie un conducteur de taxi-bus rencontré sur le boulevard Lumumba. « Les gens avaient peur. Quand la politique s’invite dans la rue, tout le monde devient prudent. »
Dans les communes de Limete, Kasa-Vubu et Ngiri-Ngiri, aucun rassemblement notable n’a été observé. Les Kinois, habitués aux soubresauts politiques, ont préféré vaquer à leurs occupations, dans une vigilance silencieuse. Les écoles ont fonctionné, les marchés se sont animés progressivement, mais l’ambiance demeurait marquée par l’incertitude.
Du côté de l’Alliance pour le changement, cette interdiction est perçue comme une entrave aux libertés démocratiques. Le parti dénonce une répression préventive et affirme que l’appel au dialogue reste plus que jamais d’actualité face à la crise politique et sécuritaire que traverse le pays.
À la mi-journée, Kinshasa avait retrouvé une activité presque normale, sans heurts majeurs ni incidents signalés. Mais derrière cette apparente accalmie, les frustrations persistent. La manifestation n’a pas eu lieu, mais le message de l’opposition, lui, continue de résonner dans une ville où chaque silence politique peut annoncer une prochaine tempête.

