Que faire pour baliser la voie à un processus électoral apaisé en République  démocratique du Congo ? C’est à cette question que tâchent de répondre les ‘‘Signataires de l’appel du 11 juillet 2020’’, un groupe hétéroclite de 12 députés et acteurs de la Société civile. Au cœur d’une conférence de presse le vendredi 17 juillet dernier à Kinshasa, ils ont fredonné en chœur leur volonté de promouvoir le consensus dans leur démarche pour obtenir des réformes électorales. Une démarche qui démarre bientôt avec des consultations que les porte-étendards de cette plateforme comptent amorcer auprès de la Majorité, de l’Opposition, de la Société civile, et particulièrement des confessions religieuses, en proie aux dissidences. 

«Nous, signataires de l’appel du 11 juillet 2020, sommes porteurs d’une idée et d’une conviction. Nous ne formons pas un parti politique ni non plus un regroupement politique. Nous sommes une initiative transversale ouverte, rassemblant des personnalités de professions et de carrières différentes issues tant de l’espace politique que de la société civile dans sa diversité et militons en faveur d’un consensus sur les réformes électorales nécessaires, gage de la paix et de la concorde nationale», révèlent-ils dans une déclaration remise à la  presse.

Pour la plupart députés nationaux, les membres de ce groupe proviennent de milieux politiques variés, voire antagonistes. Si certains sont actifs au sein de la Majorité, nombre d’entre eux militent au sein de l’Opposition. La diversité des ‘‘Signataires de l’appel du 11 juillet 2020’’ se remarque même au niveau des origines géographiques.

Elu de Luiza (Kongo central), porte-étendard d’Envol, un parti de l’Opposition, le député Delly Sesanga Hipungu salue cette dynamique qui permet de réunir autour d’une table des citoyens congolais qui ont librement choisi d’emprunter la voie de la paix pour baliser le chemin des élections de 2023. Il estime qu’il est temps de se réveiller pour entreprendre les réformes électorales en toute quiétude, en privilégiant la concertation trois ans avant le scrutin, au lieu d’amorcer des préparatifs tard et dans la précipitation.

Prévenir le chaos

«L’appel du 11 juillet, précise-t-il, est avant tout l’expression d’une conscience partagée entre signataires sur l’évidence de la division de la Nation à tous les niveaux et dans tous les secteurs. Division au sein de la coalition gouvernementale, division au sein de la majorité parlementaire, division au sein de l’opposition politique parlementaire et extraparlementaire, division y compris au sein de la société civile et, particulièrement, parmi les confessions religieuses, entraînant une fracture au sein de nos populations. Avec, parfois, des positions extrêmes comme celles vécues lors des dernières manifestations de rue, qui aggravent le contexte délétère actuel de la vie nationale sur les plans politique, sécuritaire, économique et social, sur fond de crise sanitaire de la COVID-19».

Conscient de la tension qui couve présentement au sein de la classe politique et même de la Société civile, Delly Sesanga est d’avis que le Congo est à ce jour ‘‘pris en étau par le radicalisme et l’extrémisme des uns et des autres’’. «Le pays est, de ce fait, privé d’espace propice de discussion, susceptible de favoriser le traitement, sans passion, des questions essentielles sur lesquelles la Nation devrait s’unir, afin d’envisager plus sereinement son avenir», laisse-t-il entendre.

«Face donc à ce contexte, nous, signataires de l’appel du 11 juillet 2020, avons décidé de transcender nos divergences d’opinions et d’appartenances, afin de privilégier et de promouvoir une option de responsabilité partagée, jugée à ce jour, incontournable pour prévenir le chaos et baliser la route en vue des élections transparentes, démocratiques, crédibles et apaisées en 2023», a fait remarquer Delly Sesanga.

Privilégier la voie pacifique

Au regard des violences enregistrées aux lendemains des élections de 2006, de 2011 et à la veille du scrutin de 2018, Jacques Ndjoli Eseng’Ekeli assure avoir tiré les leçons du passé pour privilégier la voie pacifique. Jadis vice-président de la Commission électorale nationale indépendante (CEI), ce haut cadre du Mouvement de la Libération du Congo (MLC) reconnait avoir eu chaud lors des tensions post-électorales de 2011.

Sénateur honoraire, élu de  Boende (Tshuapa), ce député national s’est, dès lors, décidé de s’engager sur la voie du consensus pour éviter toutes contestations violentes des résultats des urnes au terme des élections de 2023.

En perspective de ce noble objectif, le député Henri-Thomas Lokondo, membre du Groupe parlementaire PALU et Alliés), révèle avoir accepté de faire fi des divergences politiques pour privilégier l’intérêt national. «Nous avons décidé de transcender nos chapelles. Mais, notre démarche n’est pas menée pour conquérir des postes», a confié à la presse l’élu de Mbandaka.

«Pourquoi des élections pour revenir à la guerre ?»

 «Personne d’entre nous n’est dans une démarche pour obtenir un poste politique», a aussitôt renchéri Patrick Muyaya, député national du PALU. «L’idée est bien simple : nous transcendons nos divergences politiques. Sinon, pourquoi devrons-nous organiser des élections pour revenir à la guerre ? Sans unité, sans cohésion, aucun développement n’est possible», a argumenté l’élu de Funa (Kinshasa), déterminé à encourager la culture de la paix.

A ceux qui s’interrogent sur les ambitions soudaines de ce groupe restreint, qui risquerait d’évoluer en parallèle aux institutions de la République, le député Juvenal Munubo Mubi, élu de Walikale (Nord-Kivu), éclaire l’opinion. «Nous venons donner un coup de pouce aux institutions. S’il n’y a pas de consensus, nous allons tout droit au mur», conclut ce brillant avocat, responsable des relations extérieures au sein de  l’Union pour la Nation congolaise (UNC).